Journal de bord
Vendredi 6 mars 2009
Ca ne vous arrive jamais, lorsque les gens vous parlent, de ne les écouter que d'une oreille et de penser intérieurement "mais je m'en fou de ce que tu me racontes mon petit père !" ?
Moi si.
Alors oui, je vois d'ici les gens s'indigner : "quoi ? un tel discours dans la bouche d'une future psychologue ?!". Mais qu'est ce que vous voulez, personne n'est parfait.
Et surtout pas moi.
Bref, toujours est-il qu'il est 13h46 très exactement, que mon estomac crie famine, que je suis malade comme un chien (même si je n'ai jamais vu de chien malade), et que j'ai les neurones qui dansent la polka. Je la regarde, ELLE, avec mon regard aimable que je sais si bien faire. Je fais semblant d'être intéressée par ses discours pseudo-philosopho-scientifico-merdico-qui-donne-envie-d'aller-au-dodo. Honnêtement, je ne pensais pas qu'une personne sur terre pouvait aimer son boulot au point d'en parler même à la pause déjeuner (et prendre la tête des autres au passage). Merde, tout ce que je demande, c'est de pouvoir déguster mes frites tranquillement. Mais non. Non. C'est pas possible.
Parce que faire semblant d'écouter vous oblige tout de même à être attentif, histoire de ne pas hocher la tête au mauvais moment, ou de sourire au moment ou il fallait faire semblant de s'appitoyer sur le sors des enseignants chercheurs. Ca demande tout un travail de concentration et de répression des pulsions aussi.
Dans une autre vie, si j'avais été Patrick Bateman,je crois que je ne me serais pas gêné. Genre : "vous vous plaignez de l'état de la recherche en France ? Ils devraient vous virer peut être qu'ils trouveraient quelque chose". Mais non. Encore une chose impossible.
Pourquoi ? Parce que des connards du 16ème siècle ont décidé d'instaurer des "normes de bonnes manières". Ou alors parce que c'est inscrit dans notre patrimoine génétique pour assurer la survie de l'espèce humaine. N'empêche, quitte à mourir, des fois j'aimerai bien dire ce que je pense vraiment des gens.
Tiens, elle est toujours là. Vous l'entendez ? Non ? Ben moi si. Elle parle, elle parle. Ah tiens, elle fait une pointe d'humour. Vite je lui case un sourire pseudo sincère (mais c'est pas grave elle a le soleil dans l'oeil, elle ne verra pas le "pseudo").
D'ailleurs je me pose pleins de questions à son sujet : est-ce qu'elle a déjà aimé quelqu'un plus que son reflet ? Est ce qu'elle a déjà eu un fou rire ? ... Est ce qu'elle n'aurait pas l'intention de repartir dans son pays ? Est ce que si je la découpe en petit morceaux, que je l'envoie bout par bout à sa famille, ils me remercieront ? Est ce que pour la faire disparaitre je pourrais demander la légion d'honneur ?
A vrai dire, je ne suis sure que de deux réponses : pour les deux premières c'est définitivement "non".
Parfois, (parfois !) ça m'arrive d'être triste pour elle. Je me dis qu'elle ne vit que pour son boulot, que c'est son seul intérêt dans la vie ... et qu'en plus cet intérêt est tout spécialement merdique. Je sais je sais j'ai pas le droit de juger. Mais quand on sauve des vies, quand on tourne dans Indiana Jones (sauf le 4) on peut être passionné. Mais là ... là non c'est pas permis !
A une époque on pensait que pour gagner le Paradis, il fallait faire des choses extraordinaires, ou le plus souvent payer beaucoup. Je crois que j'ai gagné mon Paradis.
Et dedans, je veux une videothèque avec tous les films sorties depuis les frères Lumière ...
et un cochon d'inde. Non, une montagne de cochons d'inde !